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Asger Jorn


Autographe et photographie

Collection privée / Ce document n'est pas à la vente

Asger Oluf Jorgensen, Jorn, est né en 1914 à Vejrum (Danemark). De 1936 à 1939, il travaille dans l’Académie Contemporaine de Fernand Léger, puis assiste Le Corbusier dans la décoration du pavillon des Temps Nouveaux de l’Exposition Universelle. La première exposition personnelle d’Asger Jorn est organisée à . . . . .

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Vallauris, le 4 février 2006

J’ai commencé par écrire quelques lignes sur Asger Jorn dans la revue « Les Cahiers du Sud » avec mon ami Claude Serbanne et ceci dans les années 44-45 Je n’écrivais que sur les peintres modernes ; Claude et moi étions alors en rapport avec certains des tenants de la peinture moderne, notamment aux Etats-Unis, et nous avions été en mesure de donner des renseignements que peu de personnes connaissaient. Nous avons correspondu dès cette époque avec des peintres danois. Ceux-ci nous ont fait parvenir de nombreux documents, des images de leurs œuvres, des catalogues, et nous avons appris qu’il y avait alors un mouvement abstrait surréaliste danois. J’ai donc écrit, avec Serbanne et à partir de ces revues et de toute cette documentation que nous avions reçue, un article sur ce mouvement du Nord et, bien évidemment, ceci nous a permis d’obtenir d’autres renseignements. C’est à partir de ce nouvel article qu’Asger Jorn m’a écrit pour la première fois et nous avons eu un important échange de courrier. Un jour, je l’ai vu arriver! Je l’ai vu arriver avec . . . six ou sept peintres danois. Il y avait Pedersen et Mortensen, il y avait aussi une peintre danoise, Else Alfeld, je me souviens. J’ai donc vu arriver Jorn chez moi. C’était à Juan-Les-Pins, je venais de me marier, nous avions 20 ans chacun, ma femme et moi, et aucun moyen, un minuscule appartement. On a tapé à notre porte, c’était impressionnant, ils étaient tous grands et forts, un vrai débarquement. Il devait être midi et nous les avons invités à partager un repas. A l’époque il n’y avait pas grand chose à manger, de la poudre d’œuf qu’on était parvenu à acheter et des poix chiches. On n’avait qu’un canapé lit de 80 de large et deux chaises, on a fait comme on a pu pour asseoir tout notre monde. Ils ont adoré les pois chiches, un vrai délire ! Cela a été quelques heures extrêmement joyeuses. Jorn m’avait apporté des dessins et des lithographies qu’il m’a laissés, tous m’ont laissé quelque chose de leur travail. Cette rencontre, nos discussions sur l’art, les œuvres qu’ils m’avaient confiées m’ont permis d’écrire un nouvel article sur ce mouvement ; à l’époque, ce papier a eu un certain retentissement qui a porté . . . jusqu’au Danemark et qui a fait vraiment plaisir à Jorn, comme à ses amis. Jorn nous a proposé, à Serbanne et moi-même, de faire un livre sur ses gravures. Nous avons travaillé presque une année pour le concevoir. On correspondait énormément avec lui. Il nous faisait parvenir des gravures, nous les mettions en page, écrivions, lui envoyions nos maquettes, qu’il approuvait ou modifiait, faisant des suggestions, intervertissant l’ordre d’apparition de ses œuvres, s’essayant à aquareller telle ou telle de ses gravures pour la page titre. Le livre n’a été fait finalement que beaucoup plus tard, en 1979, . . . six ans après la mort de Jorn. Il y a eu d’emblée, dès 46, une belle amitié qui est née avec Jorn ; je l’ai accompagné auprès de Picasso que je lui ai fait rencontrer ; j’étais l’un des rares à être accepté par Picasso, non pas comme critique d’art, sans doute comme jeune homme amateur d’art, j’avais 20 ans ! Picasso m’avait pris un peu « à la bonne ». Je ne l’emm… pas, je ne lui demandais rien, ni signature par çi, ni petite dédicace par là et sans doute, je pense qu’il m’exprimait beaucoup de sympathie pour cette simple raison. On est donc allé voir Picasso au futur Musée Picasso à Antibes, j’ai fait plusieurs photos de cette rencontre ; les deux hommes ont discuté ensemble un long moment et j’ai écrit, un peu plus tard, un article sur ces discussions entre les deux peintres auxquelles j’ai eu le privilège d’assister, article paru dans la revue « Art ». Jorn a été très heureux de rencontrer Picasso. Au fil des ans, j’ai pu tisser une relation très étroite avec Jorn. Nous avions en projet une revue, « Etc. », puis une autre « Delta », cela n’a jamais abouti malgré nos efforts. Il y avait une sacrée concurrence ! Nous étions alors en relation avec Pierre Alechinsky. J’ai beaucoup de souvenirs qui me reviennent. Jorn était tuberculeux, je lui ai trouvé un sanatorium en Suisse. Il voulait venir s’installer sur la Côte d’Azur, Vallauris, la région de Grasse le tentait. Nous avons beaucoup correspondu, c’était un homme chaleureux. J’ai continué à le rencontrer pendant plusieurs années. En 54, je me souviens être allé le voir à Albisola . . . en 2CV. Il avait loué une ferme sur les hauteurs de la ville, il y avait des gosses de tous les côtés, 7 ou 8 tous blonds aux yeux bleus, une bonne moitié étant ses propres enfants. Ceci est une autre histoire. *** René Renne, critique d’art, l’un des 4 auteurs du livre « Dessins de Jorn », Ed. Silkeborg Kunstmuseum – Phases Silkeborg, Paris, 1979.