Féru de vieilles pierres, André Lhote acquiert en 1925 une maison à
Mirmande (dans la Drôme provençale) et s'attache à faire revivre le
village en y organisant une académie d'été où accourent de nombreux
écrivains, peintres, musiciens et intellectuels. Ce faisant, il engage
les mêmes efforts pour le village de Gordes avec le succès que l'on
connait.
En septembre 1948, il fait paraître dans le journal
« Combat » un article intitulé « Avis aux touristes » en faveur de
l'antique village « Alba-la-Romaine », tout proche de Mirmande, là
encore y invitant les artistes à acquérir une maison et conjuguer leurs
efforts pour que renaisse ce lieu dont une partie de la population fut
décimée par la guerre.
« C'est un village de l'Ardèche que contourne
une charmante rivière propice à la pêche et aux baignades. Il se tasse
au centre d'un cirque immense, typiquement ardéchois, où les rochers et
les chênes composent un canevas solennel. (...) Voici donc un village
qui souhaite impatiemment sa résurrection. Quel est l'artiste,
l'intellectuel possédant dans quelque fond de tiroir une ou deux
dizaines de billets excédentaires, qui reculera devant l'envie enivrante
à accomplir : sauver une belle maison ancienne miraculeusement rescapée
de la guerre et du mépris universel, s'assurer par surcroît de nobles
vacances en une contrée où fourmillent les plus capricieuses
combinaisons d'éléments naturels. »
Un seul article, un seul. Et l'appel fut entendu au-delà des frontières.
Des télégrammes affluaient : « Retenez habitation même en ruine,
arrivons... » ! Une vingtaine d'artistes français, mais aussi venus du
monde entier achetèrent des maisons en péril, aspirant à créer un lieu
unique où chacun pourrait s'exprimer sans la contrainte de devoir
s'inscrire dans un mouvement artistique. Leurs œuvres sont exposées,
dans un climat de joyeuse émulation, dans une salle attenante du
restaurant « La Petite Chaumière », en référence à la « Grande
Chaumière ».
Parmi eux, le plus connu est sans conteste Stanley
William Hayter, fraîchement revenu des Etats-Unis, il s'y fixe pour
l'été en 1951 avec son épouse d'alors Helen Philipps. Parmi ceux qui les
précèdent en 1949 et 1950, Eudaldo, peintre chilien, accueille
régulièrement ses amis Jean Le Moal et Etienne Hadju.
Les artistes
américains, Théodore Appleby et son épouse Hope Manchester s'y
installent en 1950. Tous deux fréquentaient l'atelier de Fernand Léger à
Paris. Dans la mouvance de l'Expressionnisme Abstrait, Théodore Appleby
a exposé ses toiles, en France et à l'étranger, au côté de ses amis
Jackson Pollock et Sam Francis dans diverses expositions collectives
dédiées aux peintres abstraits américains. A cela s'ajoutent les
participations aux Salon des réalités nouvelles et Salon d'automne ou
encore des expositions personnelles, notamment au Studio Paul Facchetti
et à la Martha Jackson Gallery à New-York.