« J'étais en visite chez des amis. Devant ma fenêtre, dans le jardin, se dressait cet arbre. Je l'ai peint, comme je le voyais de ma chambre, derrière une table et un fauteuil, à travers une grande fenêtre dont les rideaux formaient un cadre. J'ai pensé à Van Gogh » (Nouvelle Zélande).
Le charme paisible et si poétique de ce bois gravé illustre à merveille l'état de symbiose de Hundertwasser avec la nature. La Nouvelle Zélande, sa seconde patrie, lui offre le bonheur de vivre en harmonie avec la nature originelle, selon ses convictions environnementales profondes.
Tout jeune homme, lors de son premier voyage en Italie, l'artiste découvre les bois gravés de Hiroshige et Hokusai. La manière dont la nature y est abordée l'émerveille. Dix ans plus tard, lors de son premier séjour au Japon en 1960, il rencontre un des plus grands maîtres graveurs japonais qui, après bien des réticences, accepte de collaborer à l'élaboration d'une gravure sur bois. L'Ukiyo-e, cet art ancestral suit un déclin tragique que rien ne semble ralentir. Et pourtant, selon les propos de Mr Honma, Directeur du Musée d'Art Moderne de Tokyo, l'artiste a largement contribué à revivifier les ateliers : « . . . Je dois exprimer ma profonde admiration envers cet artiste Européen qui par son extraordinaire persévérance et son amour pour la technique du bois gravé a su raviver la flamme de l'Ukiyo-e durant deux décennies ». Ces propos rejoignent ceux de l'artiste lors de la publication du catalogue raisonné de ses estampes : « Je suis très heureux d'avoir été le premier artiste occidental à pouvoir collaborer ainsi avec des graveurs sur bois et imprimeurs japonais. Par cette collaboration, j'espère et je crois faire entrer dans ce noble art, à ma modeste façon, un peu de sève nouvelle afin qu'il puisse survivre et croître à nouveau en importance ». De 1961 à 1985, 24 gravures sur bois seront éditées, et pour chacune d'elles, non sans mal au début, l'artiste exige que chaque intervenant y appose son cachet (inkan) à égalité avec le sien, tournant ainsi le dos à l'approche individualiste du processus créatif occidental. Un probité bien mal comprise à l'atelier Mourlot où il exprima la même exigence, et fut aussitôt mis à la porte !
La réalisation entièrement artisanale de cet ouvrage, élaboré par David Kung, a été confiée à de nombreux artisans japonais talentueux, chacun scrupuleusement présenté en début d'ouvrage dans une page dédiée. L'emboîtage en cèdre du Japon libère un parfum envoûtant, dont le livre et la gravure sont aussi imprégnés. Cette publication, catalogue des bois gravés japonais de Hundertwasser de 1966 à 1975, témoigne de l'importance que l'artiste accordait à ces estampes japonaises dans son oeuvre gravé. « Pour moi, les estampes ne sont pas des copies de tableaux mais une évolution. C'est comme si j'avais la possibilité de continuer à peindre un tableau et de le développer dans une autre technique. Avec la gravure, j'entre dans un paradis que je ne peux atteindre avec le pinceau de peintre... C'est un art en détour. »
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