« La plus belle femme du monde n’a jamais eu son portrait peint, dessiné ou gravé plus souvent que Vollard. » Pablo Picasso.
Extraordinaire
destinée que celle d’Ambroise Vollard, ce jeune homme de la Réunion,
débarqué en France, pour y poursuivre des études de droit qu’il
abandonne après la licence. Sans le sou, mais doué d’un flair et d’une
détermination sans faille, il ouvre en 1894 sa première galerie de 3
mètres de large au 37 de la rue Laffitte. Là s’y entassent quantités
d’œuvres des artistes qui marqueront le XXème siècle : outre Cézanne,
Renoir, Degas, Gauguin, Van Gogh, de jeunes artistes enrichissent son
fonds, tels Bonnard, Vuillard, Matisse, Rouault et tant d’autres encore.
Il expose Picasso en 1901, puis en 1906, 1907, 1910, lui achetant à
chaque fois la production de son atelier.
De son tempérament
légendaire, bourru, obstiné et madré, Gertrude Stein relate dans ses
mémoires : « Quand il était vraiment maussade, il appuyait sa lourde
silhouette contre la porte vitrée de son magasin, qui donnait sur la rue
; étendant ses bras au-dessus de sa tête, il accrochait ses mains aux
deux coins supérieurs du chambranle et il fixait la rue de ses yeux
sombres. Alors personne ne songeait à essayer de pénétrer chez lui. ».
Picasso a peint ou gravé plusieurs portraits d’Ambroise Vollard, dont le célèbre portrait cubiste de 1910.
Le marchand avait acquis une vieille demeure au Tremblay-sur-Mauldre, initialement destinée à Georges Rouault, lequel n’en faisait pas usage. A l’automne 1936, il la prêta à Picasso qui y logea Marie-Thérèse Walter et leur fille Maya. L’artiste put y installer un atelier dans la grange et passer les fins de semaine en famille, loin de l’effervescence et des tensions de sa vie parisienne. Marie-Thérèse s’y épanouit, heureuse de voir grandir son enfant au plus près de la nature, d’accueillir Picasso en amant et père attendri. Et la production de l’artiste témoigne de cet espace temporel paisible, des natures mortes, des minotaures, des portraits de Maya, et surtout ceux lumineux de Marie-Thérèse, aux courbes envoûtantes, souvent dans des tons clairs, vert amande, vieux rose, bleu ciel, jaune, mauve.