Le dessin est « le labeur secret » selon les propres mots de l'artiste, la part de l'intime du maître architecte.
Avec
près de 6500 pièces, la Fondation Le Corbusier détient l'essentiel de
ces dessins. Le jeune homme, qui a dessiné depuis son plus jeune âge,
décidera dès ses 15 ans de devenir artiste-peintre, mais son professeur
de l'époque, qui ne lui trouve pas plus de talent que cela pour la
peinture, va l'orienter . . . vers l'architecture.
En regard de son
activité d'architecte, de celles de théoricien, d'homme de lettres et de
peintre, la production graphique de le Corbusier et le dessin sont
longtemps demeurés plutôt la part secrète de son oeuvre. La valeur
esthétique, historique et scientifique de ce corpus, la variété des
thèmes, des techniques et des langages stylistiques explorés en feront
pourtant un ensemble d'une richesse exceptionnelle dans l'histoire de
l'art du XXe siècle.
Le cheminement créatif, son évolution pas à
pas et ses méandres, peuvent se suivre tout au long des années, de sa
jeunesse jusqu'à son dernier souffle de vie. Le Corbusier dessinera très
souvent pour garder « la mémoire » non seulement des lieux qu'il
découvre au cours de ses nombreux voyages , mais aussi des idées. Dans
ce but, il réalise des dessins au crayon, des encres, des aquarelles,
des pastels. Le dessin, au fil des ans, deviendra l'outil d’élaboration
d’un langage esthétique, en l’occurrence le Purisme ; le trait se fait
vigoureux, incisif, et les combinaisons d’objets usuels où se mêle
parfois un personnage - ici une femme - mènent à la création de formes
nouvelles.
Le Corbusier illustrera le renouvellement radical d’une esthétique, dans
des compositions où les formes organiques (coquillages, os, bois…) font
intrusion dans des natures mortes aux objets distordus dans lesquelles
l’artiste exploitera le rapport dialectique du dessin et de la couleur.
On
sait que l’exploration du thème féminin (thème majeur dans l’esthétique
de l'artiste) sera décliné à toutes les époques de sa création en de
multiples études dans lesquelles Le Corbusier exploitera la plupart des
techniques (pointe d’argent, crayon de couleur, pastel, craie grasse,
gouache, encre de couleur, technique mixte …) pour traduire les formes
souvent les plus généreuses.
Le Corbusier travaillera sur la «
synthèse des arts », exploitant reprises et réinterprétations de thèmes
antérieurs qui par de multiples variations aboutissent aux diverses
formes d’expression explorées par l’artiste (dessin, peinture,
sculpture, collage, tapisserie, …) , ainsi que les grandes compositions
des années cinquante où l’artiste s’autorise à évoquer les thèmes chers à
Picasso (Taureau, Minotaure, Icône ou Totem.)
Ce n'est que dans les
années 50 que Le Corbusier aborde les thèmes hédonistes (la rêverie, le
farniente, l’amour, la musique, la villégiature à Cap Martin…)